A tout seigneur, tout honneur… André Martin, président de l’aéro-club du Lys et instigateur de la Route des Cigognes, expédition reliant la France au Maroc et retour en motoplaneur (vers Beni-Mellal puis Ouarzazate), fut à l’origine de la découverte et de la prospection des possibilités immenses mais jusque là inexploitées du vol à voile dans le Sud marocain ; il nous fait part de sa réaction après l’expédition Ouarzazate de mai 2000 qui lui doit beaucoup.
3 circuits de plus de 1000 km réalisés en 3 jours successifs par Denis Flament au départ de Ouarzazate ! Merci de nous avoir enfin apporté une preuve aussi évidente de la pertinence des observations effectuées lors des 5 éditions de « La Route des Cigognes » en  1988, 89, 90, 92, 98 ! En tant qu’organisateur de ces randonnées internationales de motoplaneurs, je suis, je l’avoue, immodestement satisfait d’avoir ainsi participé à la révélation du potentiel vélivole exceptionnel de cette région du Sud marocain, magnifique, accueillante… et maintenant accessible !
Je félicite Didier Chevalier d’avoir pris la relève cette année. Sa passion l’emportant sur la raison, il a même eu l’audace incroyable de développer, avec succès, une activité de prospection en planeur pur ! Je reste toutefois convaincu que le vrai vol à voile itinérant de prospection  dans de telles contrées doit être totalement libre, donc motorisé… Il est vrai qu’il avait remarquablement préparé le terrain en recensant méthodiquement et largement les zones posables lors d’une expédition routière préalable. Aussi bien que le livret des champs vachables dans les Alpes ! Et indispensable.

Enfin, n’épargnant pas sa peine, il a entrepris d’établir un contact exploratoire avec tous les responsables marocains pouvant aider au développement d’un Centre de Vol à Voile local permanent de notoriété internationale. A l’instar de ce que des voisins européens ont réalisé en Espagne… attention de ne pas se faire doubler… la France, nation amie de très longue date du Maroc ne devrait elle pas prendre l’initiative de l’aider à réaliser ce projet… Qu’en pense la FFVV ? L’effort à consentir est à la portée d’un groupe de supporters déterminés, trouvant les ressources financières nécessaires via un sponsoring axé sur des partenaires liés au tourisme et aux échanges commerciaux franco-marocains réciproques.

Certains ont déjà identifié un nouveau site idéalement situé au pied du Haut-Atlas avec hébergement dans une kasbah rénovée… Ne peut-on imaginer y organiser des championnats probatoires regroupant dès mai 2003 une flotte d’une trentaine de motoplaneurs ? Utopique ? Non ! C’est une question de volonté collective, et ce ne peut plus être l’affaire d’un animateur illuminé… ma pomme… prêchant (mal) dans le désert du scepticisme vélivole français confiné au mieux à ses limites hexagonales !
Cela implique également un support médiatique pertinent et permanent. Question : qui parmi vous a visualisé la magnifique cassette VHS réalisée par Micavia Films  sur « La Route des Cigognes 89 » ? on y entend Francis Caers, pilote de DG 400 ayant fait deux années de suite le trajet Anvers/Ouarzazate commenter ses vols exceptionnels. Qui se souvient de son article enthousiasmant dans une édition d’Aviasport de l’époque. Il y décrivait l’aérologie et concluait : « le grand Sud marocain offre des possibilités énormes pour le vol à voile de niveau mondial avec ses 11 à 12h de vol utilisables, des plafonds voisins de 5.000m, des varios intégrés de 6 m/s, des visis exceptionnelles. Excellentes conditions, propices à la réalisation fréquente de grands circuits de plus de 1.000 km ».

C’était il y a 11 ans déjà ! Merci Denis d’y avoir cru et de nous l’avoir brillamment confirmé. Mais quelle longue attente pour le « missionnaire » que je suis ! Qui avait découvert par hasard le 16 mai 1988, coincé 200m sous le niveau du col qui relie Marrakech à Ouarzazate dans un RF9  sous-motorisé et plein pot, que les cumulus au nord du col étaient au niveau de celui-ci (2.200m) et que les alto-cu tout là haut à 4 800m étaient en fait de vigoureux cumulus du versant sud égarés à travers l’étroite passe rocheuse minérale… Or Beni-Mellal, camp de base du Centre Royal de Vol à Voile de l’Atlas, est au nord… pratique pour venir en voiture de Casa ou Rabat mais moins fumant que le centre de la France… Alors que l’Australie, ou l’Afrique du Sud ou le Nevada sont à 100 km à peine de l’autre côté. A 3 heures de vol de Paris par la ligne !

Sur la route des cigognes

Il est vrai que j’avais moi aussi tardé à prendre au sérieux des anciens vélivoles d’Afrique du nord qui parlaient de leurs vols, notamment en Algérie, comme de leur guerre de 14 ! N’empêche que j’ai décidé d’y aller voir… La première édition de « La Route des Cigognes » en mai 1988, à destination de Beni-Mellal, regroupait un échantillon de tout ce qui était à l’époque classable en motoplaneur : SF 28, RF 9, RF 10, Taifun, Pik 30, DG 400… Grâce à un excellent esprit d’équipe, de règle pour ce type d’expédition (individualiste et trop forte personnalité s’abstenir) tout ceci a fait bon ménage. Au point de recommencer en l’année suivante avec cette fois 13 appareils. Mais définitivement : destination Ouarzazate. Pilotes ébahis, accompagnateurs hyper-satisfaits qui en redemandent… Malheureusement, cause boulot, je ne pourrai accompagner les 4 appareils de l’édition 1990. En 1991, tout  est annulé en catastrophe, Guerre du Golfe oblige. Mais ce n’est que pour mieux repartir du 1er au 17 mai 1992 avec 14 appareils, dont un avion Mousquetaire accompagnateur. Et vidéaste professionnel. Cinq équipages ont annulé dans les derniers jours… Stress de l’organisateur ! Retour avec 12 heures de magnifiques rushes vidéo, toujours en attente de montage….

A noter que ces migrations au long cours sont toujours parties et revenues à la date prévue… Inch Allah ! … Au prix parfois d’étapes 100% motorisées sous le plafond parfois très bas du parcours Côte est de l’Espagne… les pionniers de l’Aéropostale savaient déjà que la visi reste acceptable… mais que la distance semble longue entre les aérodromes de dégagement !…
Innovation en mai 1998 : 5ème édition monotype : 6 Stemme ! Expérience exceptionnelle mais je l’avoue, loupée au plan médiatique. Même mon bon ami Jean-Renaud Faliu qui nous a rejoint pour quelques jours a oublié d’en parler….il est vrai qu’il aurait bien voulu boucler un 1 000 km et que l’on n’a fait « que » des circuits de prospection de 500 à 800 km tous les jours pendant 10 jours… Sans exclure les joies du bivouac dans les dunes !

Vers de futures aventures

J’avoue que, depuis, la motivation m’a un peu manqué car, appréciant avant tout le jeu collectif, j’ai perçu qu’atteignant le niveau de la grande perfo avec d’aussi belles machines, ceci exacerbe les attitudes individualistes, trop fréquentes an niveau compétition. Mais au fait, n’est-ce pas là aussi une des raisons du déclin de l’activité vélivole ? Il était donc temps que d’autres prennent le relais et fassent nettement mieux ! Merci !

En plus de dix ans, les choses ont beaucoup changé : les motoplaneurs sont de plus en plus performants et fiables, les loggers facilitent les débriefings, les GPS facilitent les déroutements, Internet met la météo à portée des cyber-cafés de Ouarzazate, les cédéroms peu coûteux à reproduire peuvent accueillir plus de 20 minutes de très bonne vidéo, beaucoup plus facile à monter chez soi …

Le vol à voile a besoin pour sa relance de vivre de « Grandes Aventures », porteuses au plan médiatique. Et si on tentait, tous ensemble, de pérenniser « la Route des Cigognes »… reliant chaque année, la France du sud (Sainte-Croix du Verdon ?) à Ouarzazate pour y effectuer 10 jours de vol de découverte ? En invitant nos proches à nous y rejoindre par la ligne ?
Peut-être qu’ainsi constituerions-nous une équipe de base (européenne ?) déterminée à aider nos amis marocains à créer un site dédié permanent, disposant de son propre matériel.  Ami vélivole, fais toi connaître si tu y crois comme nous. Si comme je l’espère nous sommes nombreux, nous pourrions nous regrouper au sein d’une association spécifique et créer très prochainement un site Internet dédié pour faciliter nos échanges.

En attendant de nous retrouver ensemble centrés dans un + 6 m/s jusqu’à près de 5 000 m, sous 2/8 de Cu. Découvrant une vue panoramique cristalline de plus de 100 km, renforçant encore le contraste entre ocre minéral et vert intense. Prêts pour un long plané final seulement limité par la nuit ! Imagines-toi en longue finale sur une piste de 3 000 m, rampe lumineuse éclairée, à la fin d’un vol de plus de 10h ! 1.000 km dans la poche ! C’est à ta portée !

André MARTIN